Petits miracles de la médecine : des bébés prématurés en meilleure santé

Les progrès de la médecine au cours des 15 dernières années permettent désormais de sauver davantage de bébés prématurés et de leur garantir un avenir en bien meilleure santé.
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« Non seulement ils vont mieux en 2022, mais une grande partie d’entre eux vont bien ! » trouve le Dr Marc Beltempo, directeur adjoint du Réseau néonatal canadien.
Chaque année au Québec, plus de 6 000 enfants (7 %) naissent prématurément, c’est-à-dire à moins de 37 semaines de grossesse (sur 40 en moyenne).
De ce nombre, environ 230 naissent avant 25 semaines (prématurité « extrême »). Ils ne pèsent que 500 grammes (1,1 lb) et tiennent dans une main.
Ce scénario n’est jamais ce que vous espérez lorsque vous attendez un enfant.
« C’est le cours dont personne ne veut. C’est un cauchemar. Il y a des hauts et des bas », explique Ashley Cox, dont le garçon est né à 24 semaines (voir autre texte ci-dessous).
Mais grâce aux progrès de la médecine depuis 1980, la survie de ces amours s’est améliorée d’environ une semaine tous les 10 ans, ont montré plusieurs études. Aujourd’hui, la moitié des bébés nés à 23 semaines vont grandir, alors qu’on a observé ce taux chez ceux à 24 semaines 10 ans plus tôt, au Québec. Poids, sexe, santé du nourrisson : plusieurs facteurs influencent la survie.
« Ils survivent plus, note aussi le Dré Christine Drolet, néonatologiste au Centre hospitalier universitaire Laval. Le pendule descendit. »
Qualité de vie
Ce succès s’explique en partie par le partage des connaissances entre les 30 centres spécialisés en prématurité au Canada, depuis 15 ans. Stéroïdes avant la naissance, médecine du cerveau, délai de 30 secondes avant de couper le cordon ombilical : les bonnes pratiques se sont répandues.
Bien qu’ils soient heureux de sauver plus de nouveau-nés, les médecins insistent sur le fait que les bébés très prématurés (moins de 32 semaines) sont également en meilleure santé.
« Le bébé de 24 semaines en 2022 va mieux que le bébé de 25 semaines d’il y a 15 ans, explique le Dr.r Beltempo, néonatologiste au Centre universitaire de santé McGill. Ils survivent mieux. C’est la grande différence. »
« Le but n’est pas d’épater et de sauver à tout prix le moindre bébé, précise le Dré Drôle. C’est essayer qu’ils survivent, mais aussi qu’ils aient une bonne qualité de vie. »
Au cours de la première semaine de vie, les grands prématurés risquent toutes sortes de complications (hémorragie cérébrale, problèmes pulmonaires, etc.). Même si tout va bien, elles sont hospitalisées pendant au moins trois mois après la naissance.
« On connaît les grandes complications, assure le Dré Drôle. Mais il y a toujours une partie où nous n’avons pas le contrôle, même si tout a été fait dans les règles de l’art. »
Est-ce qu’on le sauve ou pas ?
Aujourd’hui, le seuil de viabilité est fixé à 24 semaines. Avant cela, les parents sont impliqués dans la discussion pour décider de réanimer ou non l’enfant.
« Il est difficile de tracer une ligne noire ou blanche arbitraire », explique le Dr.r Beltempo. Selon les valeurs familiales, il peut y avoir des points de vue différents. »
Malgré tous ces progrès, les bébés prématurés sont plus à risque de plusieurs problèmes de santé (poumons, cœur, paralysie cérébrale, etc.)
Et même si la médecine atteindra un jour ses limites de survie, les médecins sont confiants pour améliorer encore leur pratique.
« Nous ne ferions pas cela si nous ne pensions pas qu’ils auraient une bonne qualité de vie. La majorité fonctionnera de manière normale », jure le Dr Beltempo.
Taux de survie des bébés très prématurés
- 23 semaines : 50%*
- 24 semaines : 70%
- 25 semaines : 85%
- 26 semaines : 90%
*Ces chiffres sont approximatifs et varient en fonction de plusieurs facteurs
EFFETS ASSOCIÉS À LONG TERME
- Retards de langage
- Trouble déficitaire de l’attention/hyperactivité
- Développement moteur ou intellectuel
- Surdité ou vision (0,01 % au Canada)
FACTEURS QUI AUGMENTENT LE RISQUE DE PRÉMATURITÉ
- Mamans de moins de 20 ans ou de plus de 45 ans
- Grossesses multiples
- Mère avec un niveau d’éducation inférieur
- Faible statut socio-économique
- Diabète de grossesse
- Prééclampsie
Sources : Réseau néonatal canadien et Institut national de santé publique du Québec
J’espère rentrer chez moi dans un mois
Après un accouchement précipité à 24 semaines et 2 jours de grossesse en mai, les parents du petit Ezekiel commencent enfin à planifier un avenir à la maison, loin des machines qui ne cessent de sonner.
« Nous aurions aimé le présenter à notre famille comme tout le monde le fait avec son bébé », avoue Ashley Cox, 33 ans, rencontrée récemment à l’unité de néonatologie de l’Hôpital de Montréal pour enfants.
« Mais depuis une semaine ou deux, on sent qu’il rentre à la maison. Nous avons hâte de nous réveiller un jour et de l’avoir à côté de nous », dit-elle en berçant sa poupée.
Nul doute que le petit Ezéchiel était très attendu par ses parents qui avaient fait trois fausses couches. Cependant, son arrivée le 23 mai les a plongés dans un tourbillon d’angoisse.
Le garçon ne devrait toujours pas être dans le monde; la date d’échéance était le 11 septembre.
À la naissance, le bébé ne pesait que 710 grammes (1,57 lb). L’accouchement s’est bien passé, mais les parents ont alors craint pour sa vie à quelques reprises.
« Dès qu’il y a eu un bipon a paniqué », se souvient Mmoi Cox, qui se tourne vers les moniteurs dès que les chiffres s’emballent.
À son chevet
Infection urinaire, ponctions lombaires, exposition au COVID-19 : les premières semaines ont été difficiles.
Depuis qu’Ezéchiel est hospitalisé, sa mère passe 12 heures par jour à son chevet, et rentre chez elle le soir. Son père vient aussi après le travail.
« Ce sont des choses que les gens normaux ne vivent pas dans leur vie », compare Mmoi Barreur.
Son poids a triplé
Depuis peu, le nourrisson n’a plus besoin d’une machine pour l’aider à respirer, ce qui suggère un départ à domicile d’ici un mois. Nourri de force depuis sa naissance, il va devoir apprendre à boire au biberon.
Malgré les angoisses liées à sa prématurité, sa mère est désormais confiante pour l’avenir de son fils, dont le poids a augmenté depuis sa naissance.
« Avec la façon dont il se comporte, on a moins peur », a-t-elle déclaré. Quand on fait ses soins, ses yeux sont ouverts, il regarde partout. »
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