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Nouvelles locales

Moetai Brotherson, député polynésien : « Nous ressentons tous la persistance d’une situation coloniale »

Moetai Brotherson Député Tavini huira’atira – RDA – Nupes de Polynésie

Il est très rare que tous les étrangers parlent d’une seule voix. C’est le cas aujourd’hui, lors de la révision de la loi sur le pouvoir d’achat. Pourquoi ?

Il y a eu comme un choc électrique sur ce texte. Nous étions souvent partis divisés lors du mandat précédent. Là-bas, nous partageons la même surprise et la même indignation de voir les territoires ultramarins encore relégués et absents des débats, car ces questions nous concernent tous.

Que sont-ils ?

Premièrement : le pouvoir d’achat. Cette question existe bien sûr en métropole, mais, chez nous, il y a double peine : les prix sont plus élevés et les salaires plus bas. C’est la préoccupation majeure du moment. Mais, à un niveau plus profond, nous ressentons tous la persistance d’une situation coloniale, d’une vision qui continue d’exister dans les administrations et le gouvernement à des degrés divers. J’ai ressenti cela chez tous mes collègues, y compris dans les départements (la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie ayant un statut plus autonome – NDLR). Il y a une volonté de changer la donne institutionnelle avec plus d’autonomie partout. En ce qui me concerne, c’est dans mon ADN politique, mais cette volonté est désormais partagée.

Cette question des relations entre la France métropolitaine et l’outre-mer revient régulièrement : récemment, les élus des collectivités territoriales d’outre-mer ont lancé un appel depuis Fort-de-France pour interpeller l’Etat à ce sujet. Quelles sont les causes du malentendu ?

On constate l’échec des politiques de décentralisation menées à l’étranger. Chez nous, en Polynésie, elle se manifeste de diverses manières. Pendant la crise sanitaire, c’était le flou artistique permanent entre ce qui devrait être de la responsabilité de l’Etat et la responsabilité de la Polynésie. Autre exemple, lors de la négociation d’accords économiques et commerciaux dans notre bassin naturel, le Pacifique. Il doit être validé par l’Etat – et je ne parle pas d’accords diplomatiques, mais plutôt économiques, qui sont théoriquement du ressort de la Polynésie. Enfin, il y a la question de l’immigration de France métropolitaine, c’est un thème aux répercussions importantes sur l’emploi local et l’accaparement des terres avec une augmentation du prix du mètre carré. Dans les îles habitées de Polynésie, la terre est hors de portée des autochtones.

La Polynésie a élu pour la première fois trois députés indépendantistes de votre parti, les Tavini huira’atira. C’est une évolution majeure, que reflète-t-elle ?

Il ne faut pas surinterpréter, ce n’est pas un référendum d’autodétermination. Mais elle est symptomatique du fait qu’une grande partie de la population a brisé le verrou de l’indépendance. Cette peur se dissipe à force d’explications. C’est aussi une victoire pleine d’espoir et un message à l’État. Un message qui a été envoyé à tous les territoires d’outre-mer, et Emmanuel Macron ferait bien de l’entendre.

Cela ne semble pas être le cas : de nombreux élus étrangers ont dénoncé, lors du remaniement, un durcissement du gouvernement. Qu’est-ce que tu penses ?

On a déjà vu la perte d’un ministère à part entière, et on vit la tutelle du ministère de l’Intérieur comme si les territoires d’outre-mer risquaient de troubler l’ordre public. On ne sait pas si c’est volontaire ou non, mais tous les territoires d’outre-mer l’ont bien perçu. Cela dit, nous ne contestons pas nos intentions et nous jugerons sur des documents. Je note que lorsque M. Carenco est venu à La Réunion, il n’a fait aucune visite de terrain et s’est limité à des réunions à la préfecture. Il connaît mal les territoires d’outre-mer, malgré son expérience : la réalité ne se limite pas aux administrations.

Un dernier mot sur la situation particulière de la Kanaky-Nouvelle-Calédonie, que vous connaissez bien. M. Darmanin a annulé sa visite prévue le 26 juillet et a convoqué tout le monde à Paris pour une réunion du comité des signataires de l’accord de Nouméa. Les indépendantistes ont exprimé leur refus de se rendre en France métropolitaine. Comment analysez-vous la situation ?

A l’époque du gouvernement d’Édouard Philippe, il y avait une grande sagesse dans la gestion du dossier. Depuis, on a vu une démonstration de fermeté de la part du gouvernement, une volonté de tout garder en France. La nomination au gouvernement de Sonia Backès (qui est l’une des leaders de la droite anti-indépendantiste néo-calédonienne – NDLR) est un symbole, et un casus belli pour les séparatistes, presque une déclaration de guerre. Il y a une expression sans équivoque de la Nouvelle-Calédonie à l’Assemblée nationale (les deux députés, Philippe Dunoyer et Nicolas Metzdorf, sont issus de la mouvance anti-indépendantiste – NDLR), même si nous sommes là pour porter la voix des Kanaks. Mais la situation est explosive, peut-être plus qu’ailleurs.

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