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Nouvelles locales

Louis Aragon, le combat anticolonial

Un grand livre dans un petit ouvrage, par la grâce du génie d’Aragon, illustré par le savoir et l’étendue de la documentation de l’historien Alain Ruscio. L’auteur parcourt un siècle d’anticolonialisme PCF, le plus souvent seul en parti. Le courage de ses militants, parfois leur aveuglement, dans le miroir de l’action politique, poétique, littéraire d’Aragon.

Pierre Juquin, auteur de la remarquable biographie que nous connaissons, peut écrire dans la préface : « L’idéologie colonialiste avait, malgré Jaurès et quelques dirigeants clairvoyants, pénétré les masses populaires, la gauche, le mouvement ouvrier. » Un contrepoint radical à la création du PCF, dont un élément fondateur est précisément le refus de la domination impériale, la lutte déterminée pour l’émancipation des peuples colonisés.

Louis Aragon, les surréalistes et le jeune PCF s’unissent à l’été 1925 pour dénoncer la guerre du Rif. Première rencontre avec un jeune leader de 25 ans, chef de campagne, Maurice Thorez, condamné à quatorze mois de prison, alors que 165 militants étaient incarcérés. Il écrira : « Ce qui a fait de moi un communiste (…) c’est la guerre du peuple marocain contre l’impérialisme français. »

Dix années durant lesquelles Aragon, devenu communiste non sans divers déboires, fruit d’un ouvriérisme qui durera, dénonce, poète et journaliste, « exotisme de pacotille »les massacres commis en Indochine et ailleurs, et participa à la dénonciation de l’Exposition coloniale de 1931.

1935 : l’angoisse de la menace fasciste entraîne une modification du discours communiste sur la question coloniale, comme celui de l’écrivain, actif pour le rassemblement populaire, homme de lettres et homme politique reconnu, bientôt directeur du quotidien Ce soir. « Notre destin ressemble à la guerre en Ethiopie. On ne croit jamais aux premiers que c’est la peste qui gagne. » La revendication d’indépendance a été suivie de celle de la lutte pour les acquis démocratiques, afin de rattacher les peuples colonisés à la métropole, notamment en Indochine contre le Japon, en Afrique du Nord contre les revendications de Mussolini.

Relations conflictuelles avec Aimé Césaire

De la Libération aux années 1960, après que les communistes ont été contraints d’abandonner l’illusion d’une Union française progressiste face à la brutalité du parti colonial, Aragon a pleinement dénoncé l’horreur des répressions – Vietnam, Algérie, Madagascar et pays d’Afrique noire. Son œuvre poétique en témoigne, et si aucun roman n’en est le sujet, la toile de fond de nombre d’entre eux porte en toile de fond le quotidien d’une société en peine du refus de la décolonisation.

Discours admirable au Congrès mondial de la paix à Vienne en 1952 : « Que mon pays, devant les nations, reprenne enfin son visage de lumière. (…) Je vous salue (…) hommes et femmes qui êtes venus ici et dont les paroles, au cœur même de la douleur, ont préservé pour mon pays cette amitié bouleversante sur laquelle repose le plus sacré de nos devoirs ! Je vous salue, patrie vietnamienne, patrie khmère, patrie laotienne, je vous salue, frères et sœurs du Maroc, Tunisie, frère res et soeurs d’Algérie…”

Intellectuel prestigieux, il était moteur dans toutes les causes à défendre, tandis que, en tant que dirigeant communiste, il intervenait avec un esprit d’ouverture.

Le livre traite des différents épisodes de sa relation conflictuelle avec Aimé Césaire. Nul doute qu’Aragon, grand découvreur avec Elsa Triolet de jeunes talents, a toujours eu plus de mal à commercer avec ceux qu’il reconnaît comme ses égaux, Éluard, Césaire…

Quarante ans après sa mort, Alain Ruscio s’élève à juste titre contre l’ostracisme dont est victime Aragon dans de nombreux ouvrages académiques concernant les intellectuels français et la guerre d’Algérie. Il réévalue, en soulignant l’importance politique éminente du geste en plein conflit, l’apport majeur des Lettres françaises à la lutte pour l’indépendance de l’Algérie, qui ouvrent largement leurs colonnes à la jeune littérature algérienne. Vous devriez lire ces versets aujourd’hui :

« Plaine sans pluie où la colère est tombée

Et depuis ce jour dans le village absent

Lève l’odeur du chaume et de la chair brûlée

Et la terre assoiffée réclame un autre sang. »

Avec Mohammed Dib et Kateb Yacine, le poète assume la contradiction entre une langue française, véhicule d’une culture si riche, mais aussi la langue de l’oppresseur. Le temps des indépendances vint, fasciné par la civilisation arabo-musulmane, Aragon donne un chef d’oeuvre, Le fou d’Elsa, qui sape les stupides sentiments de supériorité des défenseurs du colonialisme. Oui, un parcours magnifique qu’il faut explorer.

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