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Nouvelles locales

Il voit le monde d’en haut

Antonio Soler

Écrivain espagnol, auteur de Sud (1)

Quand Antonio Soler écrit, il évoque un univers fait de rencontres quotidiennes, de situations que lui racontent ses amis, de bruits de la rue, de souvenirs, de ses lectures. El Diablo cojuelo (le diable boiteux), l’a marqué au point d’inspirer son dernier roman Sud.

Écrite en 1641 par Luis Velez de Guevara (2), l’œuvre picaresque raconte comment un étudiant qui s’enfuit par les toits de Madrid entre dans une maison où il libère un diablotin coincé dans une ampoule. Ce dernier, pour le remercier, soulève les toits de Madrid pour permettre à l’étudiant comique de surprendre des toiles intimistes. Comme dans le cas du « diable boiteux », pour écrire SudAntonio Soler, « perché » au-dessus de ses personnages, soulevant au sens figuré leurs crânes pour découvrir « cette face cachée et sombre que nous avons tous ».

De l’avis du critique espagnol, Sud est son roman le plus abouti. Il y en avait d’autres comme El Camino de los ingleses, Prix Nadal (2004), porté à l’écran par Antonio Banderas, comme lui, né à Malaga. La salle de cinéma ? Un pas de côté. Son univers, c’est d’abord la littérature rencontrée grâce à Marcel Proust et James Joyce. Sud, son dernier opus, doit en partie son existence à l’écrivain irlandais dont il est si inconditionnel qu’il a créé en 2008, avec 8 auteurs hispanophones, « l’ordre des Finnegans ». Comme chaque 16 juin, le groupe se rend à Dublin pour Bloomsday, le festival qui célèbre la vie de James Joyce dans toute l’Irlande.

Ce jour-là, alors qu’Antonio Soler se promenait dans les rues de Dublin, il remarqua sur le trottoir, près de Trinity College, une plaque indiquant qu’à cet endroit précis une des scènes deUlysse. « Je me suis dit : pourquoi ne pas essayer d’écrire, à mon tour, le roman de toute une ville, Malaga, en faisant entendre toutes ses voix et toutes ses langues ? » Comme Ulysse, Sud est une sorte de radiographie d’un jour, autour d’une prolifération de personnages, pas moins de 220 ! « Une sorte d’orchestre polyphonique jouant ensemble » dans une ville qui est censée être Malaga, là où souffle le « terral », ce vent venant des terres andalouses.

Dans un terrain vague d’un quartier abandonné, un homme encore en vie est allongé sur le sol. Son corps est couvert de fourmis qui s’insinuent dans tous les orifices de son corps et le dévorent peu à peu. Autour de l’homme, une multitude de personnages gravitent dans des lieux différents, sans forcément se rencontrer. « Cet homme à moitié mort a existé. Une amie médecin à l’hôpital m’a dit qu’elle avait été appelée par les services d’urgence. Ils l’ont prévenue qu’ils l’emmenaient aux urgences. A côté d’elle, un de ses amis médecins a écouté la conversation et a compris qu’il s’agissait de son mari. L’homme, un avocat homosexuel, s’est suicidé car il n’assumait plus de mener une double vie.

« Je voulais créer un univers qui reproduise la vie dans une ville du 21ème siècle.e siècle avec ses bruits, ses personnages et leur langage de rue, un monde aujourd’hui où se parler passe par les messages WhatsApp. » Un univers familier de l’auteur. « Quand j’étais jeune, je vivais beaucoup dans la rue avec mes amis. Nous avons joué au football, nous nous sommes battus. Plus tard, nous avons commencé à nous rencontrer dans des bars. On traînait souvent tard le soir, je vivais dans un monde socialement mixte ».

« Antonio Soler s’inscrit dans la lignée des écrivains de l’âge d’or espagnol pour qui le pouvoir évocateur des mots permet la création d’images », explique Line Amselem, maître de conférences en littérature et histoire culturelle de l’Espagne, à l’Université polytechnique Hauts-de-France. « Dans toutes ses œuvres, on retrouve le désir des hommes, la sensualité des femmes avec des moments burlesques, voire grossiers. Sud est un roman très intellectuel, où le grotesque se mêle à des expressions fleuries très drôles et savoureuses », elle continue.

Voix posée, douce et lente, Antonio Soler, 66 ans, s’affirme comme un autodidacte en littérature. « J’ai étudié l’économie, ça n’avait rien à voir avec ça. » Mais très jeune, il lit, dévore les romans. De toutes, Joyce est celle qui l’inspire « la diversité et les multiples possibilités d’écrire une histoire ». Il avait 22 ans lorsqu’il écrivit son premier essai. Sa sœur le lit et se charge de l’envoyer à un concours. Il est primé. Encouragé, il se lance dans un premier roman à 27 ans, tout en vivant en dehors du monde littéraire. A l’affût du monde qui l’entoure, il continue toujours d’observer, levant le voile sur des vies, comme son ami le « diable boiteux ».

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