Sous-estimée par le système de détection fédéral en raison d’un jeu atypique, Harmony Tan a longtemps douté de ses capacités. Aujourd’hui, le joueur français, 115e mondial, semble pourtant avoir passé un cap. A 24 ans, elle atteint les huitièmes de finale à Wimbledon et compte bien battre l’Américaine Amanda Anisimova pour atteindre les quarts.
À 16 ans, elle a pensé à arrêter le tennis. Huit ans plus tard, elle dispute le tournoi de sa vie à Wimbledon. Harmonie française Tan, 115e monde, affronte lundi 4 juillet l’Américaine Amanda Anisimova, 25 anse monde, pour une place en quart de finale du Grand Chelem de Londres.
Au premier tour, la Française de 24 ans a gâché le retour de la reine Serena Williams en la faisant céder après un combat physiquement et mentalement épuisant. Une victoire d’autant plus belle pour Harmony Tan qu’elle s’est déroulée sur le mythique Center Court où sa rivale avait remporté 7 de ses 23 titres du Grand Chelem.
Elle a ensuite enchaîné face à l’Espagnole Sara Sorribes (6-3, 6-4), bien mieux classée qu’elle (45e). Au troisième tour, elle s’est imposée comme la patronne face à la Britannique Katie Boulter (6-1, 6-1) en 50 petites minutes.
LE RÊVE CONTINUE POUR HARMONY TAN 🇲🇫
La Française écrase Katie Boulter devant son propre public et se qualifie pour les 1/8 de Grand Chelem pour la première fois de sa carrière 🔥🔥
Elle n’avait jamais gagné 3 matchs de suite sur le circuit principal, la voici en 2ème semaine 👏 pic.twitter.com/FJxqExiL2I
— Univers Tennis 🎾 (@UniversTennis) 2 juillet 2022
habité par le doute
De quoi booster sa confiance en elle mise à mal par un début de carrière compliqué. Adolescente, son jeu atypique, tout en variations de longueur, de hauteur, d’intensité pour déstabiliser l’adversaire, l’a laissée à la porte de la détection fédérale.
« Ça m’a fait beaucoup douter », confie-t-elle aujourd’hui. « Quand j’avais 16 ans, j’avais mon bac et je voulais retourner à l’école. J’ai passé le concours d’entrée de Sciences Po Paris et j’ai été accepté. Et puis j’ai réfléchi un peu, je me suis donné deux ans pour voir comment ma carrière évoluait Et comme je commençais à jouer un peu mieux à ce moment-là, j’ai continué ».
Rencontrer l’ancienne joueuse Nathalie Tauziat va changer sa vie. L’ancien n°1 français, finaliste à Wimbledon et à l’US Open, va permettre au jeune joueur de prendre peu à peu confiance en lui.
« J’étais un peu dans le flou. Ma mère (journaliste, ndlr) a essayé d’avoir des numéros de coachs et elle est tombée sur celui de Nathalie. On l’a appelée, elle nous a répondu et c’est tout. C’était énorme ! chez elle, dans le Sud-Ouest. On a pris la voiture le soir même, on a roulé sept heures, et on s’est lancé : on a fait dix jours de roulage.
« Nous n’allons pas attendre cinq ans pour que vous vous convainquiez que vous pouvez battre un top 100 »
« Il faut toujours la persuader. L’an dernier, à Saint-Malo, je lui ai crié dessus (sic) après un premier tour durement gagné : ‘Demain, tu joues le 85’.e monde et on ne va pas attendre cinq ans pour que tu te persuades que tu peux battre un top 100. Le lendemain, elle l’a battue », raconte son entraîneur dans l’équipe.
En janvier 2022, la joueuse d’origine cambodgienne et vietnamienne, née à Paris, était la seule Française, avec Alizé Cornet, à voir le second tour de l’Open d’Australie. Le scénario cruel de son match l’a mise sous les projecteurs : elle a quitté la Margaret Court Arena de Melbourne en fauteuil roulant en raison d’atroces douleurs au mollet qui l’ont poussée à abandonner avant la fin du troisième set face à Elina Svitolina.
Une blessure dont elle reviendra plus forte. Après le tournoi WTA 250 de Guadalajara et un échec au deuxième tour, elle entre pour la première fois dans le top 100.
Après sa victoire au troisième tour de Wimbledon, Harmony Tan a rendu hommage à Nathalie Tauziat. Cependant, depuis novembre 2021, elle a un deuxième co-entraîneur : Sam Sumyk, qui a notamment entraîné Victoria Azarenka et Garbine Muguruza. De quoi tirer le jeune joueur vers le haut.
Harmony Tan ne manque pas non plus une occasion de remercier sa famille de l’avoir soutenu. Sa mère aime dire qu’elle a su que sa fille était une fanatique de tennis le jour où, victime d’une chute du deuxième étage à l’âge de 8 ans, sa première question a été « Maman, tu penses que je pourrais encore jouer au tennis ? »
« Ma mère a vendu une maison et des appartements pour me financer les premières années. Mon père travaille et m’a aussi aidé. Comme mon frère : quand il a commencé à travailler, il me donnait à chaque fois un tiers de son salaire. Il n’y avait pas de problème pour lui , il voulait m’aider dans mon projet, il y croyait vraiment à fond », a notamment expliqué Harmony Tan à RMC Sport. Ses performances à Wimbledon devraient l’abriter à cet égard.
Avec l’AFP
France 24 Sport