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Nouvelles locales

Foi et déportation, quelles leçons pour aujourd’hui ?

Lorsque les autorités nazies du camp de concentration allemand de Dachau sont confrontées à une épidémie de typhus fin 1944, elles décident d’enfermer les malades et de les laisser périr dans des casernes séparées. Des prêtres, qui comptaient parmi les déportés de Dachau, ont alors voulu rejoindre ces malades pour les soutenir, malgré une mort certaine. « Il y avait trop de bénévoles par rapport au besoin », rapporte Guillaume Zeller.

Ce récit rapporté par le journaliste est l’un des témoignages étonnants de la manière dont les croyants ont pu garder et mettre en œuvre leur foi dans l’enfer des camps, thème des « Rencontres Foi et Déportation », organisées par le Centre européen d’aide à distance résistant (Cerd). Ce symposium, dont La Croix est un partenaire, a réuni historiens, théologiens et chefs religieux les jeudi 16 et vendredi 17 mars à Strasbourg autour de la pratique de la foi dans les camps de concentration, mais aussi autour des enseignements d’une telle expérience, « dans une société qui fait encore face au mal ».

L’un des invités de ce colloque, Guillaume Zeller, s’est particulièrement intéressé à la présence de prêtres catholiques à Dachau, à qui il a dédié un livre, La caserne des prêtres. Dachau 1938-1945 (1). Il détaille la vie de ces 2 700 prêtres internés pour des raisons politiques ou raciales. Parmi eux, les Polonais considérés – comme les Slaves – comme « Untersmenschen » (sous-hommes) par les nazis, des Allemands arrêtés pour s’être opposés au régime hitlérien, ainsi que des Français.

Emprisonnés pour être mieux surveillés, les prêtres sont cependant autorisés à célébrer la messe dans une chapelle, grâce à une dérogation prévue par un accord en 1940 entre la nonciature apostolique en Allemagne et le ministère des affaires ecclésiastiques du Reich. Alors qu’environ 1 000 d’entre eux ont péri, une mortalité supérieure à la moyenne du camp, « il paraît qu’ils ont mieux résisté psychologiquement », indique Guillaume Zeller.

Des sacrements pour « survivre »

« Recevoir les sacrements a permis aux chrétiens de survivre », abonde Adrien Louandre. Le jeune historien raconte dans Dieu n’est pas mort en enfer. Chrétiens dans les camps nazis (2), les pratiques religieuses qui ont pu avoir lieu dans plusieurs camps malgré leur stricte interdiction. Il mentionne ainsi des aveux faits » en marchant « , ou des hôtes volés par un chimiste néerlandais pour être distribués.

Des chercheurs du musée d’Auschwitz-Birkenau ont également identifié plusieurs témoins matériels de pratiques religieuses juives, comme des châles de prière, des phylactères ou des torahs dans le camp. Présente au colloque, l’historienne du musée, Thérèse Montor-Clichy, mentionne également des œuvres de survivants, représentant des scènes de prière et de méditation, dont des peintures du peintre et sculpteur David Olère (1902-1985).

Dès lors, dans cet enfer concentrationnaire, « Dieu est-il mort ? « Où est Dieu quand l’homme déshumanise son frère ? « Pouvons-nous encore parler de Dieu ? Adieu ? », se sont interrogés les participants au colloque. « Le XXe siècle s’est trouvé bouleversé par le constat de l’absence de Dieu »admet Frédérique Poulet, professeure de théologie dogmatique
au Collège des Bernardins, à Paris, et notamment auteur de Célébrer l’Eucharistie après Auschwitz (3).

« Il y a de vrais fruits dans la concentration », ose Guillaume Zeller : « Dieu, au sens chrétien, est sorti plus fort de l’expérience de Dachau », poursuit-il en rappelant que « la nécessité pour les prêtres d’aller vers les communautés d’athées, de communistes ou du monde du travail y était en partie comprise ».

La foi juive ébranlée après les camps

Dans les communautés juives, la situation est assez différente : « On ne voulait plus parler de religion quand on rentrait des camps », raconte le grand rabbin de Strasbourg, Harold Weill. Après une longue période de « non-dit » et mal à l’aise avec l’identité et la foi juives, « il y a un processus de retour à l’identité chez les plus jeunes, qui se traduit par une volonté de réétudier les textes »dit le grand rabbin.

Un phénomène qui serait apparu au sein du « troisième et quatrième générations après les survivants »auquel Adrien Louandre appartient également. « Ces déportés chrétiens veulent nous dire quelque chose »souligne l’historien, qui assume la démarche « très personnel » de « catholique pratiquant » ce qui l’amène à s’intéresser aux pratiques religieuses dans les camps. « Je l’ai fait parce que Hans et Sophie Scholl (4), entre autres, m’ont converti ».

Pour ce faire, il a pu interroger des rescapés, consulter des archives et analyser des témoignages déjà publiés. Une entreprise délicate, car il devait mener à bien « des analyses nuancées, avec des témoignages de foi non nuancés », et qui représentent souvent « quelques pages d’ouvrages plus conséquents ».

Ces difficultés peuvent, en partie, expliquer pourquoi ce sujet n’est pas « peu traité ». Cependant, il est nécessaire car « l’homme d’aujourd’hui n’a pas vraiment changé »se souvient Guillaume d’Andlau, directeur du Centre européen des résistants déportés (Cerd). « Il a encore une fragilité et une capacité à croire aux mirages ».

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