Ce sont les têtes d’affiche de la Pride, on les voit de plus en plus à la télé : les drags sont partout. Mais qui dit drag ne veut pas seulement dire Drag Queen. Loin d’être un bloc monolithique, le drag rassemble des artistes de tous bords. Nous avons réuni cinq d’entre eux pour connaître leur opinion sur l’état du drag au Québec.
• Lisez aussi : Est-ce cher de faire du drag ?
• Lisez aussi : Qu’est-ce que cela signifie d’être queer? Nous avons interrogé 7 personnalités LGBTQ+
Poupée Suki
André Pham fait du drag depuis 10 ans. Créateur, il a toujours été passionné par la mode et la couture. Et comment décrirait-il Suki Doll ? « Fashionista, audacieuse et forte en tête », son personnage est un hommage à ma mère, « qui a dû tant sacrifier en immigré au Québec ».
Comment décririez-vous la traînée ?
« C’est une illusion. C’est un art porteur de message. Drag est aussi l’un des piliers de la communauté LGBTQA+, c’est une plateforme qui rassemble les gens. »
Y a-t-il trop de dragues ?
« Drags, il n’y en aura jamais trop. Je ne vois personne se plaindre que des hétéros fassent la même émission encore et encore, parce que c’est la norme. »
La popularité du drag, une bonne nouvelle ?
« Drag donne une plateforme et une voix à une communauté. Plus vous voyez de drag queens, plus vous voyez de diversité de drag queens et d’expériences.
« Ça a un impact positif, à mon avis, de voir des drag queens ailleurs que dans un bar, à 2 heures du matin. Quand vous voyez des émissions de dragsters à la télévision pendant la journée, cela prouve que c’est un travail, pas seulement un passe-temps.
Y a-t-il suffisamment de diversité dans le glisser?
« Au Québec, il n’y a pas assez de place pour les artistes de couleur. Lorsque ces artistes ont l’occasion de se produire, c’est souvent lors d’une fête réservée uniquement aux personnes non blanches. Après ça, on ne les voit plus. »
• Lisez aussi : La drag queen Barbada commente avec humour les tweets qu’elle a reçus
Gaytorade
Jorie Pedneault, qui s’identifie comme une personne non binaire, est musicienne. Depuis mai, il évolue aussi comme drag king au Québec sous le nom d’artiste Gaytorade. Il s’amuse à recréer des performances musicales iconiques, se replongeant dans ses fantasmes d’adolescent. Son drag s’éloigne de l’image du drag king macho et sexualisé.
Comment décririez-vous la traînée ?
« C’est avant tout un art performatif, une occasion de jouer un personnage sur scène. C’est créer de grands excès. En tant que personne non binaire, je ne suis pas très intéressé à jouer avec les extrêmes du genre. Cela ne fait aucun bien à tout le monde de voir des stéréotypes sur scène. »
Y a-t-il trop de traînées partout?
« Voyons, où sont ces drags ? Il y en a peut-être deux qu’on voit régulièrement dans les médias, ça ne suffit pas. Il en faudrait encore plus. Pas seulement des drags, mais plus de personnes queer dans les médias.
La popularité du drag, une bonne nouvelle ?
« C’est incroyable que des artistes comme Rita Baga aient ouvert la voie. Maintenant, nous devrions pouvoir voir les autres lettres de l’acronyme LGBTQ+, pas seulement le G [gai].”
Y a-t-il suffisamment de place pour la diversité dans le glisser?
« J’ai l’impression que les gens sont à l’aise avec le fait d’avoir une sexualité différente de l’hétérosexualité, mais la diversité des genres n’est pas encore acquise. Il faut comprendre que la communauté drag est encore un milieu dominé par les hommes cisgenres.
• Lisez aussi : Les personnes trans nous disent ce que c’est que de nager en public
• Lisez aussi : Voici pourquoi Demi Lovato peut changer ses pronoms
Gisèle Berceuse
Celui qui participe à la troisième saison de La course de dragsters du Canada a commencé comme danseuse pour Rita Baga il y a 13 ans. Pour décrire Gisèle, Simon Gosselin dit toujours qu’elle est assez belle pour être bête !
Comment décririez-vous la traînée ?
« Ce sont des acteurs qui créent un personnage et l’habitent. Le personnage va être tellement accompli qu’on pense la connaître, qu’elle est une entité distincte de l’acteur. L’objectif principal est toujours de divertir.
Y a-t-il trop de dragues ?
« Drag existe depuis si longtemps. À un moment donné, si vous n’êtes pas tenté de le voir, personne ne vous oblige à regarder. C’est le consentement !
« Quand je pense à toutes mes idoles d’enfance, Marc Labrèche, Guy A. Lepage, Pierre Brassard, Jean-Michel Anctil, ces gars-là faisaient du drag ! Je pense qu’ils se sont tous déguisés en femmes plus souvent que moi, en fait. »
La popularité du drag, une bonne nouvelle ?
« Plus nous en voyons, plus cela normalise ce que nous faisons. Parfois, on dirait que les drag queens se moquent des femmes, mais c’est tellement le contraire. C’est un hommage au travail que les femmes accomplissent chaque jour. Pour nous, c’est littéralement notre travail de bien paraître. »
Y a-t-il assez de place pour la diversité dans le drag ?
« Il y a toujours du racisme dans le monde du drag, mais je pense que les temps changent. Si on a fait une blague qui a blessé quelqu’un, on s’excuse et on la retire du numéro, c’est tout.
« Je n’ai jamais eu de problème avec les drag kings ou les bio queens (femmes cisgenres qui sont des drag queens). Ces drags regorgent de talent et si vous avez le talent et que vous travaillez bien, vous en ferez votre place.
Chill Vigneault
L’humoriste Audrey-Anne Dugas se traîne en dehors du circuit des bars. Son personnage de Chill Vigneault est un fuckboy d’un coeur tendre. « Comme si Jay du Temple et Loud avaient un enfant. C’est un peu un rappeur réveillé, mais est-ce vraiment?» elle décrit.
Comment décririez-vous la traînée ?
« Le genre est déjà une performance. Chaque jour, nous jouons et nous enfilons un costume pour montrer à quel groupe nous appartenons. Drag consiste à le pousser à l’extrême et cela soulève des questions. Mais c’est aussi un sacré bon spectacle. »
Y a-t-il trop de traînées partout?
« Il existe depuis des années, mais il commence à peine à être connu du grand public. Pourtant, les cotes d’écoute montrent que c’est quelque chose que les gens veulent voir. Je ne pense pas qu’il y en ait trop partout, non. »
La popularité du drag, une bonne nouvelle ?
« Le fait que le drag soit plus accessible, par exemple à la télé, le fait connaître en dehors des grandes villes comme Montréal. Je vais produire une soirée à Chicoutimi et la réponse a été incroyable.
« C’est important de voir des drag shows, mais ça ne devrait pas être la seule représentation de personnes queer. »
Y a-t-il suffisamment de place pour la diversité dans glisser?
« Il n’y en a pas assez, mais ces dernières années, cela a changé. Pendant la pandémie, de nombreux rois ont créé une plateforme sur les réseaux sociaux. Maintenant, on les voit plus sur scène.
• Lisez aussi : Enfin reconnu comme une personne non binaire sur ses identifiants
Aïe Macaroni
Ni roi ni reine, Yikes Macaroni traine depuis un an et demi. Iel décrit son personnage comme « un clown, un gobelin, un métamorphe ». Sa traînée floue entre les sexes est censée être « à la fois sexy et un peu grossière ».
Comment décririez-vous la traînée ?
« C’est jouer avec le genre et l’exagération. Parfois, c’est être super féminin, super masculin, entre les deux ou quelque chose de complètement différent ! Il y a beaucoup de choses qui traînent, même si vous ne vous en rendez pas compte. Lady Gaga et Cher, elles traînent.
Y a-t-il trop de traînées partout?
« Oui et non. Il n’y a pas trop de traînées, mais je pense qu’il y a trop de traînées similaires. Moi, j’aimerais voir autre chose, voir des dragues dans les concours de cuisine, avoir un Grand frère faites simplement glisser.
La popularité du drag, une bonne nouvelle ?
« Cela crée une véritable industrie de la drague où il est possible de gagner de l’argent en faisant ce que vous faites.
« Lorsque les gens consomment de l’art, cela leur ouvre les yeux sur un monde qu’ils n’ont peut-être pas connu. C’est pareil avec le drag, ça montre qu’il est possible de vivre dans un monde moins rigide et moins codifié.
Y a-t-il assez de place pour la diversité dans le monde du drag ?
« Il y a plusieurs scènes en drag, il y a une scène plus populaire, le genre de show où tu peux amener tes amis hétéros, et il y a la scène plus alternative. Sur la scène plus populaire, il y a moins de diversité dans les artistes.
Une vidéo qui pourrait vous intéresser :
journaldemontreal