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Nouvelles locales

Andrei Bastunets, défenseur biélorusse de la liberté de la presse

Pas d’ambition démesurée chez Andreï Bastunets. « Moi, je demande juste à pouvoir faire mon travail, répète le journaliste. Je veux l’exercer comme on m’a appris à mes débuts il y a trente ans, à l’époque de la perestroïka… Bon, c’est vrai que c’était un autre siècle ! » Depuis, on le sait, les bouleversements libertaires des années 1990 n’ont pas eu de conséquences durables. En Biélorussie, les voix dissidentes ont, une à une, été muselées par le président Loukachenko, frauduleusement réélu en 2020.  » Aujourd’hui, se souvient Andrei Bastunets, vous pouvez être inquiet pour un simple like sur Facebook. » Son pays a beau être en Europe, à trois heures d’avion de Paris, la démocratie n’y est qu’un leurre.

La mise au pas du pays n’épargne pas les médias. Une trentaine de journalistes sont actuellement incarcérés pour atteinte à l’ordre public, incitation à l’émeute, haute trahison… autant « fausses accusations », selon Reporters sans frontières. Objectif : distiller la peur au sein des rédactions. Dans ce contexte, il a fallu un certain courage pour prendre la tête de l’Association biélorusse des journalistes (BAJ). « Quelqu’un devait s’impliquer », selon Andreï Bastunets. On veut de la flamboyance, de l’emphase… mais ce n’est pas le genre d’homme. Il ne théorise pas son engagement, il le vit. Dans une chronique récente, il a préféré se cacher derrière les mots de Victor Hugo : « La liberté de la presse à côté du suffrage universel est la pensée de tous éclairant le gouvernement de tous. Attaquer l’un, c’est attaquer l’autre. » Le sujet est vieux de deux siècles, et n’a pas pris une ride.

Une association reconstituée en exil

Andreï Bastunets a longtemps monté la garde, puis il a fini par s’exiler, comme la moitié des membres de l’association. C’était l’été dernier. L’étau se resserre, les arrestations se multiplient… et il y a trop d’intimidations.  » Un jour, il explique, les policiers sont arrivés chez mon fils, avec leurs armes automatiques, et ils ont tout retourné. » Le journaliste avait tout poussé jusqu’ici – les fouilles brutales, les interrogatoires musclés – mais personne ne menace son enfant. Où est-il allé? « Quelque part en Europe. » Nous n’en saurons pas plus. Excès de prudence ? Pas certain. Souvenez-vous de l’affaire Pratassevitch : en mai 2021, le gouvernement biélorusse a détourné un avion de ligne pour arrêter à bord le journaliste d’opposition Raman Pratassevitch. Du jamais vu sur le continent !

Là où il vit désormais, Andreï Bastunets a reconstitué son association. Avec d’autres, il traque le fausses nouvelles diffusé par Loukachenko et tente de les contrecarrer en ligne. Une façon de continuer, comme disait Albert Londres, à « mettre le stylo dans la plaie », mais la version 3.0. Le collectif des exilés a beaucoup à voir avec la guerre en Ukraine, à une époque où « Les médias biélorusses relaient mot pour mot le récit de Moscou »… Parallèlement, le journaliste s’emploie à alerter l’opinion publique internationale sur le sort de la trentaine de ses confrères actuellement incarcérés.

Le 3 juin, l’Association biélorusse des journalistes a reçu le prix de la liberté de la presse décerné par l’Unesco, un soutien moral et financier majeur. A la remise de cette distinction, Andreï Bastunets a clashé sa veste cheap et ses chaussures fatiguées. En aparté, il confie : «Lorsque j’ai fui l’été dernier, je n’ai pris qu’un seul sac. Je me suis revu un mois plus tard… » A la fin de la cérémonie, il s’est éclipsé sur la pointe des pieds, comme gêné par tant d’honneurs. Non sans répéter, une dernière fois : « Je veux juste pouvoir faire mon travail. »

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